Comment se passe une enquête de canonisation ?

Les premiers pas pour introduire une cause de canonisation

Quand on veut introduire une cause de canonisation, un certain nombre de questions se posent : qui peut être candidat, quand peut-on lancer la cause, qui peut prendre l’initiative, etc. ? Il s’agit des premiers pas avant d’engager les démarches de demande d’ouverture auprès de l’évêque local, auquel incombera ensuite la charge de mener l’enquête préliminaire à l’introduction de la cause.

Qui peut être proposé pour la canonisation ?

Peut être proposé comme candidat à la canonisation tout catholique mort en odeur de sainteté et ayant les qualités requises suivantes :

  1. Réputation de sainteté
  2. Exercice des vertus chrétiennes de façon héroïque
  3. Absence d’obstacles insurmontables contre la canonisation.

La réputation de sainteté ne serait pas suffisante si elle n’était pas basée sur l’exercice héroïque des vertus ; il ne suffirait pas non plus d’avoir mené une vie sainte et d’avoir exercé les vertus de façon héroïque s’il n’existait pas de réputation de sainteté.
Et encore, même si toutes les qualités requises existaient, on ne pourrait pas introduire une cause de canonisation ou la poursuivre après l’avoir commencée, si un obstacle insurmontable survenait pour cette cause.

1. La réputation de sainteté

La réputation de sainteté est l’opinion générale manifestée publiquement de façon spontanée et constante sur le martyr ou la vie vertueuse et les miracles réalisés par le serviteur de Dieu, qui induisent le peuple à le vénérer et à se recommander à lui.
La réputation de sainteté, la « fama sanctitatis », doit être  spontanée, durable, croissant continuellement et généralisée c’est-à-dire basée sur un exemple de vie héroïque, passée au service de Dieu et des hommes. Les dernières Normes de la Congrégation pour les Causes des Saints insistent beaucoup sur cet aspect.

2. Exercice héroïque des vertus

Il est requis que le candidat à la canonisation ait exercé les vertus chrétiennes de façon héroïque. Le jugement définitif sur le côté héroïque des vertus est du ressort du Pape.
Pour lancer la cause il suffit que l’on puisse penser, pour de solides raisons, qu’exista dans le serviteur de Dieu un tel exercice des vertus.
La vertu héroïque est une habitude infuse par laquelle l’homme, uni par la grâce divine, face aux plus grandes difficultés se comporte habituellement d’une façon hors du commun, en accomplissant de difficiles et répétés actes de vertu avec un grand courage et avec plaisir. Pour la béatification, l’exercice héroïque des vertus théologales et des vertus cardinales est exigé.

3. Obstacle insurmontable

Une fois données pour existantes, la réputation de sainteté et l’exercice héroïque des vertus chrétiennes, il peut y avoir quelques obstacles insurmontables qui empêchent l’introduction ou la poursuite de la cause. C’est la raison pour laquelle, avant d’introduire une cause de canonisation, l’évêque doit s’informer par l’intermédiaire de la Congrégation des causes des saints s’il existe de la part de celle-ci ou d’autres instances romaines quelques obstacles insurmontables.

L’enquête diocésaine

Il s’agit d’une enquête informative dont le but est de recueillir le maximum d’informations concernant la vie et les vertus du Serviteur de Dieu. Mais il s’agit juste, à ce stade, de recueillir les informations et non de les analyser. Cela se fera au cours du Procès romain, qui débutera après la clôture de l’Enquête diocésaine.
Concrètement, il y a deux sources principales d’informations sur la vie et les vertus d’un Serviteur de Dieu :

  • la première concerne les interrogatoires des témoins
  • la deuxième concerne les documents provenant du Serviteur de Dieu (écrits publiés ; correspondance ; conférences écrites, audio ou vidéo) ou bien concernant le Serviteur de Dieu (articles, expertises, témoignages écrits).

Pour recueillir ces informations, l’évêque du diocèse nomme trois commissions d’experts :

  • la première, appelée « commission d’enquête » est, en réalité, un tribunal, composé d’un délégué épiscopal (juge), d’un promoteur de justice (autrefois appelé avocat du diable) et d’un ou plusieurs notaire(s). Cette commission est chargée essentiellement des interrogatoires des témoins. Le juge est chargé d’interroger les témoins ; le promoteur de justice doit veiller au respect des procédures et doit s’assurer que toutes les personnes ayant des objections à la Cause puissent être entendues ; les notaires assurent la rédaction des procès-verbaux et la saisie des auditions.
  • La deuxième, appelée « commission d’histoire et d’archives » est chargée de recueillir tous les documents provenant du Serviteur de Dieu ou le concernant. Elle est composée d’experts archivistes et historiens. Pour Jérôme Lejeune, en raison de sa personnalité, des experts scientifiques ont été ajoutés à cette commission. Celle-ci est chargée de rédiger un rapport sur l’authenticité et la valeur des documents recueillis.
  • La troisième, enfin, est appelée « commission théologique ». Elle est composée d’experts théologiens et est chargée de vérifier que les écrits, publics ou privés du Serviteur de Dieu ne contiennent rien contre la foi et les mœurs.

L’enquête romaine

Après la clôture de l’enquête diocésaine, l’ensemble des informations recueillies est envoyé à Rome, à la Congrégation pour les Causes des Saints. Après un long travail de vérification de toutes les procédures d’enquête et la nomination d’un « Relateur » (qui est un membre de la Congrégation, habituellement un français lorsqu’il s’agit d’une Cause française), le Procès romain commencera. Ce sera alors le moment de rédiger la Position, synthèse de tous les documents sélectionnés lors de l’enquête diocésaine. C’est sur la base de cette Position que devront se prononcer le « Collège des Consulteurs », le « Collège des Cardinaux et Evêques » de la Congrégation et, finalement, le Pape lui-même. Si l’avis est favorable, l’héroïcité des vertus pourra être reconnue au Serviteur de Dieu, qui deviendra alors Vénérable.
Il faut pour la béatification la reconnaissance d’un miracle dû à l’intercession du Serviteur de Dieu. Cela sera l’objet d’un autre procès, dans le diocèse où aura eu lieu le miracle. Pour la canonisation un second miracle est demandé.
La procédure est extrêmement longue et demande donc de nombreuses années, d’autant qu’il y a une longue « file d’attente » à la Congrégation pour les Causes des Saints…